Un enfant de 15 mois s’est présenté à A&E avec une température de 39,2°C. À l’examen, elle était pleinement consciente, tachycardique et tachypnoétique. L’examen a révélé des crépitations à la base gauche. Une radiographie du thorax a confirmé la présence d’une pneumonie du lobe inférieur gauche. Elle a été mise sous céfuroxime par voie intraveineuse ; les premiers résultats ont révélé un taux de globules blancs de 19,1×109/l (neutrophilie) et une protéine C réactive de 126 mg/l.
À son arrivée dans le service, on a constaté qu’elle était hypothermique (33,6°C). Elle avait reçu du paracétamol (15 mg/kg) et de l’ibuprofène (5 mg/kg) en A&E. Elle n’avait pas été indûment exposée. Il s’agissait de sa première présentation à l’hôpital. Compte tenu de l’hypothermie et de la septicémie évidente, une ponction lombaire a été effectuée pour exclure une atteinte du SNC. Elle était tout à fait normale. Malgré les techniques de réchauffement, elle est restée froide pendant les 11 heures suivantes (fig 1).
Tableau des températures des premières heures suivant l’admission.
L’hypothermie prolongée a provoqué l’investigation d’une causalité centrale. Les tests de la fonction thyroïdienne, le cortisol et la tomographie par ordinateur étaient normaux. Elle a récupéré de sa pneumonie et s’est entièrement rétablie depuis.
Au vu du lien temporel entre les antipyrétiques et la chute de la température, il semble approprié d’envisager la causalité. Le paracétamol et l’ibuprofène ont déjà été liés individuellement à l’hypothermie.1,2 Logiquement, le fait de donner les deux ensemble peut avoir un effet cumulatif sur la baisse de la température. Actuellement, il semble que l’on soit très pressé de « traiter les températures », en utilisant souvent de fortes doses de paracétamol combinées à de l’ibuprofène pour atteindre les 37°C magiques. Il convient toutefois de peser les risques et les avantages de la fièvre. La fièvre induit des mécanismes de défense de l’hôte empêchant la multiplication des organismes, mais peut également entraîner des convulsions fébriles et une augmentation des demandes cardiovasculaires.
Les antipyrétiques ne sont pas sans poser de problèmes et l’hypothermie peut en faire partie. L’hypothermie est-elle mauvaise pour vous ? Probablement pas à court terme, mais généralement on ne cherche pas à la provoquer.
Un cas récent décrit également une hypothermie suite à une dose unique d’ibuprofène. Celle-ci avait une durée de quatre jours.3 L’ibuprofène a une demi-vie de deux heures et il est peu probable qu’il ait un effet aussi prolongé. La septicémie hypothermique est peu fréquente en pédiatrie mais doit également être envisagée dans les deux cas.4 Il est important de noter que dans aucun des deux cas un organisme causal n’a été identifié.